Si l’importance d’exploiter la data n’est plus à prouver dans les secteur public et privé, celle de la partager est encore sous-estimée, bien que les choses évoluent. Les collectivités sont plus avancées sur le sujet, mais les entreprises sont encore frileuses quant au partage de leurs données.
Au-delà des exigences réglementaires, les collectivités ont tout intérêt à ouvrir leurs données pour consolider leurs relations avec les citoyens et les entreprises. En effet, les stratégies d’open data (ouverture des données) favorisent la transparence, l’efficacité et la coopération entre partenaires internes et externes. Et c’est d’ailleurs aussi vrai pour les entreprises privées.
Alors, pourquoi encourager encore plus l’ouverture des données au sein des collectivités, et comment le secteur privé peut-il s’en inspirer ? Suivez le guide !
Ouvrir les données pour favoriser la transparence
Depuis 2016, la mise à disposition des données publiques est une obligation réglementaire imposée par la loi pour la République numérique du 07 octobre 2016. En France, le portail data.gouv est même accessible à tous les citoyens depuis 2011 et ne cesse d’être enrichi. Notre pays fait d’ailleurs partie des leaders mondiaux en termes d’ouverture des données publiques.
Au-delà de cette obligation réglementaire, l’argument principal de l’open data est l’apport de transparence. À l’ère de la surinformation, les citoyens ont accès à beaucoup de données et de sources d’informations, pas toujours fiables ou de qualité moyenne. En ouvrant leurs données, les administrations donnent accès à des data fiables, pratiques et dignes de confiance, directement accessibles à la source. De quoi apporter la preuve des actions menées et ainsi rassurer leurs citoyens, leur redonner confiance.
C’est aussi un excellent moyen de lutter contre la corruption financière, en analysant des données comme :
- les informations sur le lobbying
- les dépenses publiques
- les bénéficiaires effectifs des sociétés
- le financement des partis politiques
Si ces apports sont indéniables, il n’en reste pas moins des problèmes à résoudre, notamment en matière de compromis à trouver entre transparence d’une part, et confidentialité des données d’autre part.
Démocratiser l’open data pour améliorer les services publics
L’open data permet aussi d’analyser les activités d’une collectivité et d’en optimiser la gestion. Dans le secteur de l’éducation supérieure, par exemple, le partage des données permet de lutter contre l’échec scolaire, de disposer d’une vue d’ensemble des établissements et de leurs statistiques et de mettre en œuvre des moyens pour améliorer les résultats des élèves, avant qu’il ne soit trop tard.
Réussite scolaire et open data : l’exemple Affelnet
L’open data permet de calculer l’IPS (Indice de Position Sociale) qui indique à quel point un élève vit dans un contexte favorable à la réussite éducative. Ce constat a permis aux politiques de prendre des décisions qui “ont récemment fait leurs preuves. L’algorithme Affelnet, nourri par l’open data a par exemple permis de réduire fortement la ségrégation sociale entre lycées et la ségrégation scolaire” déclare Youssef Souidi Docteur en économie, co-auteur avec Julien Grenet d’un rapport sur la ségrégation sociale dans les collèges parisiens.
L’accès à la donnée fait également évoluer la relation entre une ville et ses citoyens. Par exemple, la mise à jour en temps réel des modes de transport disponibles, ou encore les offres et services existants dans les différents quartiers sont des leviers non négligeables pour améliorer l’attractivité du territoire et faciliter la vie de ses habitants.
L’ouverture des données permet aussi aux collectivités d’engager une transition vers les smart cities. Comment ? En analysant les données de consommations énergétiques, d’utilisation des énergies renouvelables, en réalisant l’inventaire des équipements électriques, en partageant avec des entreprises privées ces données pour qu’elles apportent des solutions adaptées.
Le cas Citégestion
Citégestion, la filiale d’EDF, a développé la plateforme MUSE qui permet de piloter de manière centralisée toutes les infrastructures électriques urbaines connectées. Les communes concernées peuvent réaliser l’inventaire précis des équipements électriques (grâce à la géolocalisation, la cartographie, le référencement), organiser les interventions sur le terrain et réaliser des économies de maintenance et d’énergie. Elles disposent aussi d’indicateurs de performance pertinents et sont en capacité de communiquer des chiffres clés auprès des citoyens.
Profiter de l’open data pour créer de la valeur pour les collectivités
Selon l’étude « L’impact économique de l’open data : opportunités pour la création de valeur en Europe » publiée par l’European Data portal, les gains économiques liés à l’Open Data en Europe pourraient atteindre 200 à 334 milliards d’euros d’ici 2025. Aussi, le nombre d’emplois liés à l’open data dans l’Union européenne a dépassé́ 1 million à ce jour et pourrait atteindre 2 millions d’ici 2025.
Plus concrètement, le partage de données permet de développer les offres de services. Par exemple, en termes de mobilité, l’open data permet de concevoir une application où tous les moyens de transport sont disponibles : transports en commun, services de location de vélos ou de trottinette, itinéraires pédestres… De quoi répondre aux exigences des citoyens. On peut aller plus loin en imaginant une cartographie des stationnements disponibles pour chaque mode de mobilité.
Enfin, l’open data dans le secteur public permet de favoriser l’innovation en améliorant la collaboration avec les entreprises privées : en matière de mobilité ou de logements par exemple. C’est aussi l’occasion pour le secteur public de bénéficier des innovations des entreprises privées pour améliorer leurs services.
L’exemple Veolia
Nova Veolia, filiale du groupe Veolia, a pour but d’aider les collectivités à développer des services innovants liés au concept de ville intelligente. L’entreprise a racheté Birdz, une société spécialisée dans « l’IoT environnemental » et plus particulièrement dans la télérelève des consommations d’eau. Birdz utilise l’open data pour : « coupler des données temps réel en provenance des réseaux d’eau avec des informations externes comme des données météo, par exemple ».
Birdz qualifie les données selon leur importance et le logiciel Opendatasoft permet de les rendre disponibles et de les visualiser. Cette analyse s’appuie sur les flux en provenance de 5 millions d’objets connectés capables de mesurer les métriques liées à l’eau. Le partage de données est perçu comme un moyen de créer de nouveaux modèles économiques en mettant sur pied de nouveaux services.
Les bénéfices amenés par le partage de données ne sont plus à prouver. Cependant, pour que le partage de données soit réellement efficace, il est nécessaire de respecter certaines règles :
- Étudier les données partageables, car toutes les données ne le sont pas. Elles doivent apporter du sens, ne pas être sensibles…
- Mettre en place une gouvernance des données, avec des rôles clairement définis entre les acteurs.
- Formaliser des processus de gestion et de contrôle qui garantissent que la donnée est fiable, conforme et à jour.
- Déployer des outils qui facilitent les opérations de recensement, de correction, d’enrichissement et de publication des données.
Si les collectivités et les administrations ont intégré le partage de données dans leurs processus, le secteur privé est encore frileux. Pour elles aussi, se posent d’ailleurs les questions de confidentialité, de concurrence et de sécurité des données auxquelles les collectivités sont aussi confrontées. Ce qui n’a pas empêché ces dernières d’avancer.